Texte ancien sur Philae en Egypte
L’île de Philae était, aux temps anciens, un des lieux les plus sacrés de l’Egypte. Les prêtres enseignaient que le tombeau d’Osiris y était placé; et cette île avait dû devenir, pour ce motif, un lieu saint, un but de pèlerinage, comme l’est aujourd’hui Médine, tombeau de Mahomet.
Au surplus, ce moyen de défense, qui nous paraît aujourd’hui prodigieux, a été mis ailleurs en usage par ces mêmes Égyptiens, pour protéger d’autres parties de leur territoire ; plusieurs nations anciennes ont, comme on le sait, enveloppé entièrement leur pays par des constructions bien plus considérables encore. Celle dont nous nous occupons est cependant remarquable, parce qu’elle a été élevée dans un canton sans population, sans culture, et pour des motifs qui paraissent uniquement religieux.
La route de Philae offre encore aujourd’hui quelques traces de l’antique dévotion des Égyptiens, dans les inscriptions en caractères sacrés, qui sont sculptées le long de cette route sur plusieurs des rochers qui la bordent. Ces inscriptions ne sont pas toutes entaillées dans le granit, et, pour la plupart, on à seulement enlevé la couche brune et mis à découvert le ton rose – poudreux du granit dépoli; c’est par cette teinte légère qu’elles se font alors remarquer sur le fond rembruni de la roche. Depuis deux ou trois mille ans, et peut-être bien plus, qu’elles ont été tracées, elles n’ont point changé de couleur; elles ne se sont point encore recouvertes de cette couche lisse et brune que le temps seul peut leur donner. Si tant de siècles n’ont pas suffi, combien donc ces rochers n’en ont-ils pas vu s’écouler !
Près de Philae, les inscriptions sont en plus grand nombre que vers le commencement de la route : elles sont fort élevées au-dessus du sol ; et les hiéroglyphes qui les composent, ont quelquefois près d’un mètre de hauteur. Ce ne sont point des traits faits rapidement comme ceux que les voyageurs gravent souvent sur les monuments ou sur les rochers qu’ils visitent, pour y attacher leurs noms et la date de leur passage; ils ont été gravés par des sculpteurs de profession; il a fallu des échafaudages, des instruments particuliers, et un temps assez long pour les exécuter, surtout ceux qui sont entaillés profondément. Il n’y a donc pas de doute que ces inscriptions ne soient le résultat d’une volonté méditée ; et si l’on considère le lieu qu’elles occupent, les caractères qui les forment, et surtout le peuple éminemment religieux qui les a tracées, on sera porté à les regarder comme des symboles sacrés qui rappelaient les esprits vers les idées religieuses, ou comme des inscriptions votives destinées à obtenir quelques succès des dieux.